[Test] The Medium

J’ai suivi ce jeu de loin suite à son annonce : l’écran divisé en deux était un concept intrigant que j’ai désormais pu découvrir suite à la sortie de The Medium sur PS5. Malgré le fait que les jeux d’horreur ne sont pas du tout ma tasse de thé, ma curiosité a eu raison de moi. Récitez vos incantations et voyons voir ce que ce petit jeu par Bloober Team nous réserve !

Plan large du film Constantine où l'on voit John Constantine de dos, marcher lentement sur une autoroute plein de voitures arrêtées en pleine voie, délabrées, dans un monde infernal aux tons oranges et où l'air semble plein de cendres.
Une journée comme les autres…

Nous découvrons l’histoire de Marianne, une jeune femme qui a, depuis son plus jeune âge, une certaine capacité à interagir avec l’au-delà. Son père adoptif a toujours été là pour la soutenir malgré une enfance difficile, mais lorsqu’il décède, elle doit retourner voir son domicile pour mettre ses affaires en ordre. Un mystérieux coup de fil l’interrompt et elle se voit obligée de se rendre à Niwa, une sorte de centre de vacances pour la classe populaire qui est abandonné depuis bien des années. Et Marianne ressent qu’un terrible secret s’y cache…

Plus large devant le bâtiment principal de Niwa en décombres. Le ciel est couvert et l'endroit est nappé d'une brume épaisse. On voit aperçoit Marianne dans un coin, sur la place devant le bâtiment, regardant les énormes lettres sur le toit qui forment “NIWA” avec du polonais à côté mais dont certains lettres manquent.

Ce jeu propose une histoire qui est bien écrite et dont le rythme est impeccable. J’ai été très intéressé tout du long, même avec l’horreur qui pèse et qui me fait peur (c’est le but, vous me direz !). C’est un jeu assez intelligent dans sa façon de faire et de raconter, ce qui m’a permis de vraiment vivre l’histoire de Marianne. L’utilisation de retours en arrière via l’inspection d’objets “marqués” par un événement est relativement typique dans ce genre d’univers mais est aussi poussé plus loin dans certaines séquences. Il y a un aspect historique non-négligeable que je ne veux pas gâcher mais si nous interagissons avec tous les objets, nous pouvons rassembler les pièces de ce puzzle (certes secondaire mais important) et comprendre la tragédie à Niwa. La trame principale demande aussi une légère gymnastique mentale pour avoir une image claire des événements — quelques éléments sont restés flous pour moi, avec une fin un peu facile mais globalement, c’est réussi ! Il y a un certain monstre qui hante Niwa et bon sang qu’il est flippant ! Tant son apparence (qui serait validée par Guillermo Del Toro, je parie), ses mouvements ou sa voix (et ce qu’il dit), tout y est pour nous donner la chair de poule !

Marianne se tient devant une sorte de console d'ingénieur. Le panneau est devant une vitre qui donne sur une sorte d'entrepôt. Dans le monde spirituelle, une imposante et monstrueuse silhouette se dresse dans l'obscurité.

Le gameplay est classique dans le genre horreur/enquête, avec la possibilité d’examiner un objet d’intérêt et ramasser quelques outils ou objets clés. Ce jeu reste tout de même très narratif donc l’aventure est linéaire et ne nous propose pas des phases d’exploration très vastes — fouiller la pièce d’à côté de temps à autres mais pas bien plus. La caméra ne peut pas être contrôlée, ce qui pourra décevoir certaines personnes en 2021 mais ceci ne m’a pas beaucoup dérangé, personnellement ! Par contre, les temps de chargement sont tout de même assez longs et en cas de game over, c’est légèrement frustrant. La sauvegarde est automatique et il y a dix emplacements, nous pouvons donc recharger notre partie pour revenir un peu en arrière au besoin — n’ayant pas de sélection de chapitres. Petit point trophée/succès : les chasseur·euses de trophées sont avisé·es de suivre un guide car, à l’instar d’un certain Murdered qui a pas mal de points communs avec The Medium, si vous loupez un seul objet, il faudra refaire le jeu en entier et tous les récupérer ! (désolé, trophée de platine, on se rate de peu…)

Marianne se tient dans une grande salle avec une baie vitrée. La forêt est visible dans le monde réel, tandis qu'une brume cache des bras mystérieux dans le monde spirituel. La pièce est pleine de débris et de racines tentaculaires, respectivement dans chaque monde.

La magie de ce jeu réside dans sa vision simultanée : le monde des vivants et le monde spirituel (ceci n’est pas le cas durant la totalité du jeu mais une majeure partie). C’est génial, bien exécuté et la division de l’écran est soit horizontale, soit verticale, selon le contexte pour mieux présenter la scène. Alors certes, nous sommes parfois mis dans le monde le plus convenable pour une légère séquence de plateforme où un pont n’est que présent dans un endroit mais nous ne sommes jamais vraiment à l’abri. Si un passage est bloqué dans le monde des vivants, Marianne peut utiliser un pouvoir pour déplacer sa version spirituelle, mais pas trop longtemps au risque d’y rester… une mécanique de gameplay utile pour ne pas nous sentir trop coincé et explorer un peu les limbes. Certains éléments, comme devoir briser une chaîne avec un coupe-boulon ou devoir couper à travers une sorte de peau avec un rasoir, sont longs et répétitifs — réalistes, certes, mais j’aurais préféré que ce soit instantané. Les différentes énigmes du jeu sont, elles, raisonnables et ne demandent pas un doctorat mais restent suffisamment satisfaisantes à résoudre. Pas d’armes à feu ici mais un peu de sprint pour assurer la survie de notre protagoniste, ainsi qu’un bouclier dans le monde spirituel — un gameplay plus défensif qui nous fait bien savoir quand nous avons commis une grave erreur !

Vue double entre le monde des vivants et spirituel, où Marianne parle à une jeune fille portant un masque de céramique qui cache son visage — il lui manque son bras droit et sa peau est nécrosée mais elle reste très active. Tout ceci se passe pendant que Marianne avance dans un couloir totalement délabré.

The Medium a une excellente ambiance tant graphique que sonore. Le centre de Niwa est délabré et sent la désolation, tandis que l’au-delà (ou les limbes, le purgatoire ?) est un monde torturé, tout droit tiré de l’imagination de David Cronenberg, avec des os et de la chair partout. Marianne a aussi une apparence différente, avec des cheveux blancs et des sortes de petites feuilles sortant de son bras gauche. Par ailleurs, je n’ai pas réussi à mettre le jeu en polonais mais la performance en anglais est de bonne facture. La voix de l’héroïne est très calme et expressive (chapeau bas, Kelly Burke !) et le reste du casting est très convaincant — quelques synchronisations labiales un peu brouillon mais pas de quoi gâcher l’expérience. La musique m’a marqué, avec un côté qui m’a rappelé la formidable série allemande DARK, qui m’a encore plus plongé dans l’univers du jeu. Discrète mais poignante !

Vue double à travers un cadre de porte vide, donnant sur un bureau dans lequel Marianne se tient. Elle regarde la table à moitié brisée devant elle qui est, dans l'autre monde, un amas de débris cauchemardesques et rappelant un nid de guêpes…

Je pense que les fans de Silent Hill pourront trouver leur compte avec The Medium, qui n’a peut-être pas le statut triple-A mais qui s’en sort vraiment bien. Et je dis ça n’étant pas du tout un fan d’horreur ! La “vision double” est excellente et permet d’explorer cet univers comme jamais vu auparavant. Quelques éléments me semblent un peu datés mais j’ai trouvé l’expérience mémorable. Le jeu arrive à créer une atmosphère puissante et nous livre une histoire captivante, avec une fin qui peut laisser entrevoir une suite que je ne refuserais pas. Une belle surprise pour quelqu’un comme moi qui n’attendait rien à part des frissons !

Spirituellement vôtre,
À plus !